L'aire transitionnelle chez Winnicott : l'ouverture d'un espace symbolique de créativité ou l'entrée dans la culture comme institution du Soi entre Moi et Non-Moi

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[jeudi 25 mai 2017 19:24]
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Le Soi entre Moi et Non-Moi et l'investissement du Symbolique comme principe de subjectivation.

 

 

 

D. W. Winnicott présente dans un article intitulé « La localisation de l’expérience culturelle », que Gallimard a publié en 1975 dans Jeu et Réalité. L’espace potentiel, cet espace paradoxal qui n'est ni le Moi (Self1), ni le Non-Moi, mais qui, se situant entre les deux, permet leur différenciation en faisant charnière – aire transitionnelle, d'expérience, du jeu, qui organise la vie créatrice du sujet jusqu'à son prolongement dans l'espace culturel intersubjectif (sans, toutefois, qu'elle se réduise à la production d’œuvres culturelles). Winnicott précise la localisation intermédiaire de cette aire du jeu, sa fonction régulatrice, créatrice et ainsi transitionnelle, et rappelle qu'elle trouve son origine dans l'espace fusionnel qui « à la fois unit et sépare le bébé et la mère », permettant à l'enfant de se situer dans un environnement en lui opposant, après un temps d'identification « illusoire » entre sujet et objet, une résistance. Nous verrons ce que cela a à voir avec les philosophies empiriste et, a fortiori, phénoménologique.

 

 

Voici un extrait significatif de cet article :

 

« J’ai tenté d’attirer l’attention sur l’importance, tant dans la théorie que dans la pratique, d’une troisième aire, celle du jeu, qui s’étend jusqu’à la vie créatrice et à toute la vie culturelle de l’homme. Cette troisième aire a été opposée, d’une part, à la réalité psychique intérieure ou personnelle et, d’autre part, au monde existant dans lequel vit l’individu, monde qui peut être objectivement perçu. J’ai localisé cette aire importante d’expérience dans l’espace potentiel entre l’individu et l’environnement, cet espace qui, au départ, à la fois unit et sépare le bébé et la mère, quand l’amour de la mère qui se révèle et se manifeste par la communication d’un sentiment de sécurité donne, en fait, au bébé un sentiment de confiance dans le facteur de l’environnement. »

– Donald W. Winnicott,

« La localisation de l’expérience culturelle »,

dans Jeu et Réalité. L’espace potentiel,

Gallimard, 1975.

 

Winnicott commence par y rappeler l'importance de l'aire intermédiaire du jeu, « tant dans la théorie que dans la pratique ». Comme le souligne Deleuze, Winnicott, qui entend prendre le relais de la démarche freudienne dont il souligne la rigueur scientifique, est avant tout un empiriste : là où certains échafaudent des théories pour, en un second temps, tenter à toute force de les faire coller au réel, Winnicott part de sa pratique – il a commencé sa carrière comme pédiatre, et a longtemps exercé cette activité – et développe des théories qui permettent de l'expliquer. « Les empiristes ne sont pas des théoriciens, ce sont des expérimentateurs. » (G. Deleuze & C. Parnet, Dialogues, Paris, Flammarion, 1977, p. 69.) – pour autant, l'on aurait tort de minimiser l'impact des travaux de Winnicott dans le domaine théorique : derrière leur apparence de simplicité, permise par la force explicative et synthétique, un langage accessible avec une expression claire et précise, et la capacité de l'auteur à recourir à des termes poétiques pour rendre compte de phénomènes scientifiques situés au stade préverbal, c'est à dire, précisément, de ce qui ne se dit pas, se cache la richesse d'une pensée qui saisit pleinement la complexité du développement précoce du psychisme. Ainsi, le concept d'aire transitionnelle, ou de phénomène transitionnel, revêt une importance capitale tant dans le domaine théorique, pour comprendre le fonctionnement et le développement de la psyché de l'infans, que dans le domaine pratique, clinique, pour permettre aux patients dont la capacité créatrice est paralysée de libérer cette aptitude à exprimer sa force vitale dans une relation authentique au monde.

 

L'aire intermédiaire, qui est celle du jeu, s'étend, nous dit Winnicott, « jusqu'à la vie créatrice et à toute la vie culturelle de l'Homme ». C'est un point sur lequel il nous faudra revenir. Cette « troisième aire », écrit-il, se distingue tant de l'intériorité subjective que de l'extériorité intersubjective et objective, et a été opposée à ces deux réalités qui constituent également deux pôles organisant les théories ontologiques et anthropologiques en Philosophie. En effet, l'Histoire de la Philosophie s'est longtemps polarisée entre l'Idéalisme, qui fait découler l'illusion objective d'une réalité subjective tendant parfois vers le solipsisme, et le Réalisme empirique qui fait de la psyché le fruit, par réflexion fidèle, d'une extériorité première intériorisée pouvant seule être dite « réelle ». La pensée de Winnicott s'inscrit dans la tradition contemporaine qui vise à surmonter cette opposition apparente entre Moi et Non-Moi, et à ce titre constitue un prolongement fidèle de la Psychanalyse freudienne qui fit un premier pas décisif en ce sens. En effet, pour Freud, la vie psychique est structurée par le conflit : conflit entre pulsion et morale, Ça et Surmoi, refoulement et retour du refoulé... C'est à dire, toujours, opposition entre principe de plaisir et principe de réalité. Ce que le sujet veut et agit, est toujours structuré par l'opposition entre son désir primitif et ce qui y fait obstacle. L'on peut faire le rapprochement entre cette conception dialectique du sujet et la conception phénoménologique qui, à partir de Fichte, considère que le Moi ne peut exister qu'en se posant face à un Non-Moi, et réciproquement.

 

Pour Fichte, en effet, le Moi ne peut agir qu'en tant qu'il existe un monde qui, lui résistant, permet une telle action comme effort. Inversement, le monde n'est monde qu'en tant qu'il est donné comme tel à la perception et à l'action d'un sujet. Extériorité de l'environnement et intériorité du psychisme sont ainsi inextricablement liés, ne peuvent être pensés indépendamment l'un de l'autre.

 

Winnicott va montrer comment cet intérieur que constitue la psyché subjective, et cet extérieur qui se présente au sujet comme environnement, initialement à travers la perception du « sein » comme fonction maternelle, ne peuvent exister qu'en étant rapportés l'un à l'autre, et comment un tel rapport peut se constituer à travers la phénomène transitionnel qui, en prenant place entre l'un et l'autre, permet leur articulation – c'est à dire leur permet d'exister en se différenciant l'un de l'autre et en se supportant mutuellement : l'aire transitionnelle constitue un espace neutre, qui ne relevant ni spécifiquement de l'intériorité, ni exclusivement de l'extériorité, à la fois sépare et articule ces deux aires, permettant au sujet de se rapporter à son environnement et de rapporter l'environnement à lui-même, dans une relation créative à même d'exprimer son désir face aux contraintes que lui oppose la réalité.

 

Comme, chez Fichte, le monde permet l'action du sujet comme effort en lui opposant une résistance, Winnicott comprend le principe de réalité, cette « sale histoire », comme une offense à laquelle il s'agit de résister par le développement d'une inventivité créatrice. C'est ce que permet l'aire transitionnelle d'expérience : une confrontation à travers le jeu, un va et vient permanent entre l'intérieur et l'extérieur, qui réinvente, modifie les règles, et élabore des stratégies de contournement.

 

Winnicott situe donc cette aire d'expérience, dont il souligne l'importance en tant qu'elle permet au sujet de développer un rapport créatif à son environnement, à même d'exprimer son désir malgré les résistances que lui oppose le monde – et même d'autant plus que le monde lui imposera par ces résistances de réinventer son désir – dans l'espace potentiel qui s'insère entre l'individu et l'environnement. Qu'est-ce à dire ? Qu'entend Winnicott par « espace potentiel » ?

 

L'aire transitionnelle constitue un phénomène qui n'est pas originairement présent dans le rapport de l'infans au monde. 0riginairement, nous dit Winnicott, rien ne prend place entre le nourrisson et son environnement. Cela signifie deux choses :

 

  • rien ne permet à l'enfant de résister aux contraintes que pourrait faire peser sur lui le monde, ni d'échanger avec lui, comme nous allons le voir ;

 

  • rien ne vient séparer l'enfant de son environnement. C'est à dire qu'ils ne forment ontologiquement qu'un : véritablement, l'enfant est cet environnement premier que constitue sa « mère » – au sens d'une fonction maternelle assurée par la personne qui lui prodigue l'essentiel des soins qu'il nécessite, qu'il s'agisse de la mère biologique, du père adoptif, d'un frère, d'une soignante ou même d'une institution... – et la « mère » est l'enfant. Entendons par là qu'ils ne sont pas différenciés, dans la mesure où au sein de cette relation précoce, le nourrisson est entièrement dépendant d'une mère qui, lorsqu'elle est « suffisamment bonne », anticipe absolument ses désirs et besoins, le maintenant dans l'illusion qu'il produit le sein – entendu comme la totalité pleine d'un environnement rassurant et subvenant au moindre de ses besoins. Parce que l'enfant se voit offrir le sein au moment et à l'endroit précis où il s'apprête à en exprimer le désir ; qu'il est pris dans les bras, maintenu et soutenu (« holded ») à l'instant exact où il va en exprimer l'attente, il est maintenu dans l'illusion qu'il crée cet environnement protecteur, rassurant et nourricier que Winnicott appelle le « sein ». Symétriquement, la mère qui ne vit alors que pour combler les attentes de son bébé, anticipe tous ses besoins et les ressens au moment précis où ils vont venir à être exprimés, s'identifie entièrement à l'enfant. C'est ce que Winnicott appelle la « préoccupation maternelle primaire ».

 

Ainsi, le nourrisson naît dans une aire d'illusion qui constitue une totalité indifférenciée entre lui et son monde – pour peu que la personne qui l'a en charge remplisse correctement sa fonction maternelle. Il n'a pas à subir de la part du monde de résistance à son désir, à laquelle il ne serait pas en mesure de répondre, n'étant encore capable ni d'adapter de manière créative son désir, ni de le refréner, ni de produire l'effort qui viendrait à bout de la résistance de l'environnement. Le nourrisson se trouve alors maintenu dans une phase narcissique, son propre narcissique prolongeant celui de sa mère au sein d'une relation fusionnelle, mère et enfant ne pouvant être considérés indépendamment l'un de l'autre, formant une dyade. Dans un tel contexte, l'enfant n'est ni séparé du monde, ni en relation d'échange avec lui, dans la mesure où ne peut échanger ce qui est indifférencié.

 

Dans cet état primaire, l'enfant éprouve la sensation illusoire d'un « contrôle magique », pensée « magique » qui prétend organiser le monde selon la seule loi de son désir, sans que ce dernier y oppose de résistance : la magie vise en effet à imposer aux objets extérieurs les fluctuations de la vie psychique, les soumettre à la loi de son désir et les maîtriser absolument. Ceci est bien évidemment une chimère : il ne peut y avoir d'objet sans qu'il y ait résistance de l'objet, ce que devra apprendre l'enfant, qu'il n'y a pas de moi sans non-moi ni de non-moi sans moi. Ce sera le processus de désillusion auquel prend une part essentielle le phénomène transitionnel, le développement d'une aire transitionnelle.

 

L'enfant est nourri par un objet qu'il a l'illusion de posséder et de contrôler totalement, au point que cette possession s'identifie à celle de sa propre vie comme illusion d'une totalité. La répétition de cette expérience lui donnera confiance en un désir qui sera alors considéré comme possible. Aussi l'illusion est-elle nécessaire pour le développement d'une confiance en soi, en la capacité de son désir à se concrétiser, à se manifester comme possible et produire ses effets. Par ailleurs, c'est seulement parce que l'objet aura été présenté à chaque fois qu'il aura été désiré qu'il pourra commencer à être attendu, et ainsi que le sujet pourra en développer l'envie.

 

Lorsque la mère n’est pas en capacité d’entrer dans cet état de préoccupation maternelle primaire, Winnicott dit qu’elle « laisse alors tomber le bébé », c'est à dire qu'elle le « lâche » symboliquement – entendons par là, non qu'elle le fasse tomber au sens propre, mais que fait défaut la présence de cet entourage protecteur, soutenant, rassurant et générateur d'une confiance en l'environnement qui accompagnera le développement de l'enfant et l'adulte en devenir toute son existence durant : le bébé est « lâché », au sens où il se trouve, se sent livré à lui-même dans un environnement angoissant qui ne répond pas à son besoin de protection. Ce « lâchage » s’inscrit en opposition au holding (to hold : maintenir, soutenir – l'attitude protectrice de la mère qui supporte, au sens propre, son enfant).

 

Si la mère est juste suffisamment bonne (« good-enough mother » : mère juste suffisamment bonne, ni trop ni trop peu – ce dont ne rend pas compte la traduction française –par opposition à la « good mother » de Melanie Klein, qui doit être suffisamment bonne mais ne peut l'être trop – un impensable de la théorie kleinienne), elle se détachera progressivement de son enfant, retrouvant le chemin d'une certaine autonomie de ses propres désirs, d'une relative autonomisation à l'égard du rythme de son enfant. Ellese rendra de moins en moins disponible (Pontalis explique que la mère suffisamment bonne est celle qui vous suffit, c'est à dire qui répond de manière suffisante aux désirs de son enfant pour entretenir l'illusion, mais sait laisser suffisamment de distance au bon moment pour que, le moment venu, l'on puisse s'en passer ; une telle idée fait écho à l'interprétation lacanienne du mythe freudien du meurtre du Père et du récit biblique de la ligature d'Isaac, porteurs selon lui de cette injonction faite au parent d'accepter de laisser son enfant venir à l'altérité, lui échapper, c'est à dire de faire le deuil d'une survivance de soi à travers son enfant qui serait sinon réduit à son rôle de reproduction des ancêtres, réduction niant son institution comme sujet, comme autre) – l'adaptation aux besoins de l'enfant va décroître à un rythme qui devra être adapté à ses capacités à faire face aux résistances de l'environnement ainsi introduites à son désir. Cela impose au bébé de rompre avec l'illusion de la pensée magique qui faisait de lui undieu créateur omnipotent.

 

L'enfant fait alors l'expérience du principe de réalité, qui vient opposer une résistance à son désir, au principe de plaisir, résistance qui sera nécessaire au développement de la créativité – à laquelle celle-ci vient en effet répondre. Mais il ne suffit pas que le monde résiste pour que se développe la vie créatrice : il faut encore que le sujet ait été rendu capable de répondre de manière inventive à une telle résistance de l'environnement, ce qui ne sera rendu possible que par la confiance en soi et en l'environnement acquise dans les premiers temps de la vie psychique par une relation « good-enough » avec l'environnement maternel.

 

L'enfant va donc progressivement se désilusionner, au fur et à mesure qu'il devient capable de prendre en charge lui-même les besoins auxquels la mère cesse de répondre, qu'il acquiert une certaine autonomie. Le bébé qui n'avait encore aucune extériorité ni aucune intériorité (le fameux ruban de Möbius lacanien) va alors accéder à cette différenciation du Moi et du Non-Moi.

 

Cette désillusion n'est possible que dans la mesure où le bébé s'est d'abord illusionné : ne peut en effet être séparé que ce qui a d'abord été réuni. L'expérience de la totalité est donc première à l'égard de celle de la différenciation subjective, d'une construction identitaire rendue possible par l'expérience de l'altérité.

 

De plus, ce n'est que si cette phase de désillusion est menée à bien que peut commencer le sevrage, c'est à dire qu'il faut que l'enfant ait été rendu capable d'assumer la résistance du monde qui l'appelle à produire un effort de persévérance et d'adaptation créative de son désir.

 

L'enfant doit apprendre la séparation entre extériorité et intériorité, qui ne va pas de soi. En témoigne ce que de nombreuses choses ne peuvent être situées sans ambiguïté au dedans ou au dehors : ainsi des cheveux que l'on coupe, d'une prothèse médicale, d'une greffe qui pourra être acceptée ou rejetée... A titre d'exemple, l'on peut encore citer l'implant de cet homme, Neil Harbisson, atteint d'une dysfonction neurologique qui l'empêchait de percevoir les couleurs, et qui grâce à une caméra reliée à des électrodes implantés dans son cerveau qui convertissent les couleurs en perceptions sonores, est capable d'« entendre » les couleurs – forme de synesthésie artificielle. Considéré comme le premier cyborg, cet homme pose, entre autres questions qui viennent interroger jusqu'à la définition même de la nature humaine, cellede distinguer « où s'arrête l'intériorité du corps ; où commence l'extériorité » ? A la suite d'un long combat, N. Harbisson a obtenu des autorités suédoises l'autorisation d'utiliser sur son passeport une photographie sur laquelle apparaît clairement son implant, ce qui fut perçu par de nombreuses personnes comme la reconnaissance officielle de ce que ce corps originairement étranger faisait désormais partie intégrante de lui2. De la même manière, l'ordinateur qui permet au physicien Stephen Haking, atteint d'une paralysie presque totale, de communiquer, et les prototypes permettant à des personnes entièrement paralysées d'interagir par la pensée avec leur environnement, font-ils partie d'eux ou non ? Que pensez des expériences actuellement menées en vue d'élaborer des implants mémoriels, et de l'externalisation de la mémoire, d'abord avec l'invention de l'écriture puis de l'imprimerie, enfin avec le développement du stockage numérique ? Ces phénomènes ne prennent-ils pas place dans un espace intermédiaire entre intériorité et extériorité ?

 

C'est à la caractérisation d'un tel espace transitionnel que va s'attacher Winnicott, d'abord par l'identification d'objets transitionnels, puis par leur compréhension plus générale comme phénomène transitionnel – ce n'est en effet pas tant l'objet transitionnel qui intéresse la psychanalyse winicottienne, que le phénomène qu'il recouvre : celui du développement d'une zone intermédiaire entre Moi et Non-Moi, nécessaire à leur constitution comme tels par l'opposition que permet cet espace transitionnel en tant qu'à la fois il les articule et les sépare, s'instituant entre eux.

 

Les premiers moments de la vie du nourrisson sont caractérisés par l'activité créatrice primaire et le mécanisme d'introjection : l'environnement (le sein, les soins, le lait...) fait partie de lui. Plus tard, avec la séparation, l'enfant aura à mettre dehors ce qui était au dedans par un mécanisme de projection. Cela n'intervient que du fait d'un changement de comportement de la mère qui, si elle est « normalement bonne » (traduction moins littérale mais plus propre à rendre le sens de « good-enough » que « mère suffisamment bonne ») lui oppose progressivement des résistances, altérant la relation à un rythme que le bébé est capable de supporter, ce qui permet un développement progressif du Moi.

 

Le juste rythme de cette distanciation progressive est difficile à trouver, la mère pouvant être tentée de ne pas maintenir la distance. L'objet transitionnel facilite ce processus en étant à la fois dedans et dehors, paradoxe qui n'est pas une contradiction – et n'est donc pas à résoudre – mais le dépassement de ce qui, pris comme une séparation radicale, représente une conception erronée de la subjectivité. Celle-ci en effet, on l'a vu, ne peut se maintenir qu'en étant ouverte sur une extériorité qui elle-même n'a de sens qu'en tant qu'elle est perçue et organisée par le psychisme. Si l'on ne peut évidemment affirmer, à la manière des idéologues new-age, que « tout est un » au sens où toute individualité serait chimérique, et où l'intériorité et l'extériorité seraient une seule et même chose, ne sauraient jamais être distingués, il nous faut toutefois reconnaître qu'il y a entre ces dernières une nécessaire interpénétration et un engendrement réciproque – le sujet donne sens au monde ; le monde façonne le sujet – qui rendent impossible d'y tracer une frontière nette, et rendent non seulement possible mais même nécessaire l'existence d'un espace transitionnel qui assure leur liaison. Ce phénomène transitionnel se décline d'abord à travers l'appropriation d'un premier objet qui ne relève plus exclusivement du Moi, objet transitionnel qui assure la liaison entre le Non-Moi et le Moi qui en fait l'épreuve douloureuse, expérience angoissante de la séparation, puis à travers le déploiement, à partir de cet objet transitionnel, d'un espace intermédiaire, l'aire de jeu ou d'expérience ; enfin dans la diffusion sur tout le pourtour du Moi de ces phénomènes transitionnels, instituant le champ culturel comme champ de l'expérience de jeu partagé (arts, religion, vie imaginaire, travail scientifique créatif...).

 

L'objet transitionnel vient comme on l'a dit répondre à l'angoisse de frustration de l'enfant qui éprouve la perte de son omnipotence illusoire comme séparation d'avec le monde, séparation qui en même temps, pour peu que le phénomène transitionnel se développe correctement, permet en même temps la communication et l'échange entre intériorité et extériorité, et ainsi l'institution de l'identité subjective à travers l'expérience de l'altérité. Le désinvestissement progressif de la mère doit être comblé par l'investissement d'un objet transitionnel qui est à la fois donné par le monde (il est objectivement posé préalablement à l'expérience qu'en fait le sujet) et créé par le sujet en tant qu'il l'investit et le fait tel, l'institue comme transitionnel, lui donne sens.

 

Pour aller plus loin, il nous est possible de considérer, du point de vue de l'épistémologie critique, que tout objet est réellement créé autant que trouvé, dans la mesure où l'objet trouvé ne prend sens que d'après un désir, qui en produit la signification. Ainsi, Heidegger décrit l'étant-sous-la-main comme un toujours-déjà là qui cependant n'est produit en sa signification que d'après son inscription dans la totalité d'un monde vécu structurée par la vie psychique du sujet. Aussi, l'illusion voile une vérité : le bébé crée véritablement le sein, dans la mesure où celui-ci n'apparaît que parce qu'il le demande – la mère ne le produirait pas si l'enfant n'en avait ni le désir, ni besoin. Il y a en réalité co-production du sein par la mère et l'enfant. Ce qui apparaît alors comme illusoire, c'est que cette création n'appartienne qu'au bébé seul, que l'environnement n'y prenne pas part et donc ne puisse y faire obstruction, y résister. Le sujet en effet n'accède aux choses que dans la mesure où à la fois il les rencontre comme un toujours-déjà là et les crée en leur donnant une signification, c'est à dire en les rapportant à son désir. C'est le passage de l'illusion originaire d'une création magique unilatérale et totale, à une créativité qui s'exerce dans la résistance du monde, la confrontation du principe de plaisir au principe de réalité, que doit permettre le phénomène transitionnel.

 

Ainsi se détache l'aire transitionnelle d'un espace originairement indifférencié d'illusion, première étape d'un phénomène transitionnel qui se diffusera sur tout le pourtour du Moi comme ensemble d'activités d'expériences, de jeu, l'activité créatrice comme rapport imaginatif au monde. Il ne sera pas inutile de rappeler que pour Hume, l'imagination est moins un espace qu'une faculté qu'un lieu. Chez Winnicott, la distinction n'a pas lieu : la créativité est un espace d'activité libre dans lequel le sujet joue avec le monde de telle manière qu'à la fois il joue le monde et est joué par lui, aire rassurante dans laquelle l'expérimentation est sans conséquence néfaste mais représente une manière pour le sujet d'inventer son rapport au monde en conciliant principes de réalité et de plaisir, en permettant à son désir de frayer son chemin dans le réel.

 

Le transitionnel est donc bien initialement un espace potentiel, en ce qu'il constitue un phénomène de différentiation, ou plutôt de différAnce au sens derridéen d'un jeu de va et vient, de distanciation et de rapprochement, phénomène contenu en puissance dans la relation fusionnelle mère-enfant, et qui ne se développera correctement que dans la mesure où la personne assumant la fonction maternelle, à la fois aura convenablement répondu au besoin d'attention du nourrisson, et aura, au moment et au rythme adéquat, opéré la nécessaire mise en retrait qui permettra à l'enfant de venir à l'existence en tant que sujet différencié, en son altérité – comme le psychanalyste se met en retrait pour laisser venir à l'expression le désir d'un sujet qui, originairement, vient chercher chez lui une épaule sur laquelle s'appuyer. L'on retrouve là à l’œuvre une dialectique de la distanciation et du retour à soi qui permet à l'identité de s'instituer à partir de son rapport à une altérité qui doit être posée face à elle à partir d'une indifférenciation première.

 

Le transitionnel permet à l'enfant de sortir de la confusion sujet-objet, d'accéder à un extérieur, d'appréhender qu'il y a quelque chose qui n'est pas lui, qu'il ne constitue pas une Totalité. Cela se fait, nous l'avons vu, en deux temps : la mère introduit de la frustration que vient secondairement combler le transitionnel. C'est à dire que se produit une séparation au cœur du Moi qui ne peut être rendue supportable que par une re-liaison, la création du transitionnel pour re-lier ce qui a été séparé, non pas en rétablissant la relation de (con)fusion, mais en établissant une passerelle qui permette de passer du Moi au Non-Moi dont il s'est détaché. S'opère ainsi un passage, avec le développement de l'espace transitionnel, d'une aperception subjective globale, à travers les yeux de la mère et d'une manière qui ne permet pas de différencier des objets, à une opposition – entre laquelle vient prendre place le transitionnel – entre le subjectivement conçu et l’objectivement perçu, Moi et Non-Moi. A partird'un espace transitionnel potentiel, situé en puissance dans la zone d'illusion et qui, s'en détachant lorsque celle-ci se déchire, vient séparer l'intériorité subjective et l'extériorité objectiveet s'interposer entre elles, assurant à la fois leur liaison et leur distinction, va se développer progressivement une aire créative diffuse qui trouve son aboutissement dans la vie culturelle.

 

Être humain est être capable d'opposer une intériorité à une extériorité, l'une n'existant dès-lors que par sa confrontation à l'autre, toutes deux étant donc interdépendantes, liées – et entre les deux d'établir un espace intermédiaire d'expérience, aire médiatrice qui est un lieu de repos car nous y réglons constamment notre relation entre extérieur et intérieur : si l'intériorité et l'extériorité sont toujours soumises à la remise en question (qu'est-ce qui vient de moi – est projeté ? / Qu'est-ce qui vient de l'autre – est introjecté ?), ce rapport intérieur/extérieur ne se discute plus dans l'espace transitionnel, ce qui explique l’apaisement de l'enfant lorsqu'il se saisit de son objet transitionnel.

 

La double appartenance de l'espace transitionnel à l'intériorité psychique et à l'extériorité intersubjective et objective ne fait en effet pas question, comme l'explique Winnicott dans un article de 1950, publié dans Déprivation et délinquance, Payot, 1994 :

 

« Chaque enfant fait l’expérience d’une difficulté consistant à lier la réalité subjective à la réalité partagée et perçue objectivement. Du réveil jusqu’au coucher l’enfant passe d’un monde perçu à un monde qu’il crée lui-même. Dans l’entre-deux, il y a place pour toutes sortes de phénomènes transitionnels, se situant en territoire neutre. Je voudrais décrire cet objet précieux en disant que, par une entente tacite, personne n’affirmera que cette chose réelle fait partie du monde ou qu’elle est créée par le bébé. On sait que les deux sont vrais : le bébé la crée et le monde la lui donne. Ceci est dans la continuité d’un premier travail qu’une mère ordinaire est capable de mener à bien pour son bébé : par une adaptation active la plus délicate qui soit, elle s’offre elle-même, avec son sein, des milliers de fois au moment où le bébé est prêt à créer quelque chose qui ressemble au sein qu’elle lui offre ».

 

La transformation progressive de l’aire de l’illusion en aire transitionnelle, dont l’objet transitionnel constitue une modalité, peut, nous l'avons vu, avoir lieu seulement si la mère est apte à sortir de l’état de préoccupation maternelle primaire, pour demeurer désormais une mère juste (précisément) suffisamment bonne. L'aire transitionnelle qui s'institue alors entre le Moi et son environnement forme une porte, qui enclos un espace en l'ouvrant sur l'extérieur, en se posant comme ce qui peut être mobilisé (s'ouvrir et se fermer, s'entre-ouvrir...), jouer : l'activité créatrice.

 

La créativité ne se réduit pas pour Winnicott à la production d’œuvres reconnues, ni même à la production en général, mais s'étend à tous les domaines de la vie : elle est un rapport authentique et inventif au monde par lequel le sujet confiant dans son désir ainsi qu'en l'environnement, tout en étant conscient de la résistance du réel, réinvente continuellement sa relation à l'environnement pour lui donner un sens qui lui permette d'exprimer la subjectivité de son désir. La créativité est ce qui distingue l'Homme de l'animal : la capacité à agir de soi-même, en créant son action, en lui conférant, ainsi qu'à l'ensemble de son rapport au monde, un sens au lieu de se contenter de réagir de manière instinctive à des stimuli. Winnicott se montre à cet égard très critique à l'égard du comportementalisme, qui certes donne des résultats – dont la valeur morale est à questionner – en matière de conditionnement opérant, et dissèque fort bien les mécanismes instinctifs et conditionnés, mais ne peut qu'échouer à rendre compte de la capacité de l'Homme à conférer un sens à son action, c'est à dire à proprement la créer, de la dimension créatrice de l'existence humaine3.

 

Winnicott donne ainsi à la créativité un fondement ontologique qui s'enracine dans le rapport du nourrisson au monde : l'activité par laquelle la personne existe et sent qu'elle existe, au lieu de se contenter de biologiquement vivre. Elle est un faire issu de l'Être le plus primitif, originaire, qui constitue l'entièreté du bébé avant que celui-ci ne développe dans sa différenciation d'avec le monde sa capacité d'agir. L'Être en effet caractérise pleinement, entièrement, absolument la vie du bébé encore pris dans l'illusion, qui n'ayant pas d'échange avec le monde ne peut agir en lui, se contente d'« être ».

 

L'absence de cette capacité d'inventer son action, c'est à dire au fond, d'agir de soi-même en se rendant créateur de son rapport au monde, est éprouvée par le dépressif, le mélancolique qui se sent simple spectateur de sa vie, perçoit la beauté d'un paysage en sachant intellectuellement qu'elle est présente, mais sans pouvoir la ressentir.

 

S'éprouve dans le besoin de créativité la nécessité pour celui qui vit originairement comme pur produit de ses déterminations biologiques, sociales, familiales... de s'approprier de manière inventive sa vie, son existence, de s'en rendre responsable, c'est à dire de se faire le créateur de cette vie qui lui est donnée originairement comme insignifiante et à laquelle seul il peut donner un sens. La vie lui est donnée comme être-jeté-là, mais il a à la créer en tant que pro-jet, dirait Heidegger. La capacité à créer sa vie peut en effet être rapprochée des notions heideggeriennes d'Authenticité et d'Appropriation de soi, d'un être-jeté qui a à s'inventer comme pro-jet.

 

En ce sens, l'être authentique se prolonge et se réalise dans le faire véritable, entendu comme créer, donner un sens. La créativité réside dans cette capacité de l'être humain à inventer sa vie, et déborde donc largement la production d’œuvres reconnues par une communauté d'esthètes. Inversement, toute production n'est pas créative : le travail aliéné, machiniquement réalisé, n'est pas créatif. Ainsi pourrions-nous dire que la production n'est pas toujours créatrice, et que la vie créatrice ne débouche pas nécessairement sur une production concrète.

 

La quête de l'objet transitionnel en laquelle s'est mise l'enfant aboutit donc, comme on le voit, pour peu que le processus se déroule convenablement, à la construction d'un rapport qui lui est spécifique au Réel par le jeu, à travers l'investissement d'un espace transitionnel d'expérience(s) auquel contribuent tout autant la vie intérieure et la réalité extérieure. Ce jeu se constitue comme activité différante, au sens où Derrida entend le processus de différance : un va-et-vient permanent entre le même et l'autre, une dialectique de l'identité et de l'altérité qu'autorise le transitionnel en tant que ce qui s'y inscrit est à la fois Soi et Autre, se rapporte au Soi et au monde, à l'environnement, à la fois ressemble et diffère.

 

« Cette aire n’est pas contestée, car on ne lui demande rien d’autre sinon d’exister en tant que lieu de repos pour l’individu engagé dans cette tâche humaine interminable qui consiste à maintenir, à la fois séparées et reliées l’une à l’autre, réalité intérieure et réalité extérieure »

– D. W. Winnicott, Jeu et réalité. L’espace potentiel, Gallimard 1975, p. 30.)

 

Être humain constitue une tâche immense et sans fin, consistant à tenter en permanence de réduire la tension entre ce qui vient de Soi (son désir), et une réalité qui n'est jamais conforme à ce que l'on en attend. L’aire transitionnelle nous fournit un espace au sein duquel nous pouvons nous laisser aller, car elle constitue le seul « lieu » dans lequel on ne se soucie pas de savoir si ce qui s’y passe est réel ou non. Elle est l'aire du jeu, du faire-semblant, de l'inventivité permanente qui nous permet à la fois de nous reposer du monde, de soi, et de reconfigurer notre rapport à l'environnement. Car le jeu, pour futile qu'il soit, n'est jamais inutile ni gratuit. Il est cette indispensable futilité qui consiste à inventer le monde qui nous est donné.

 

Ce qui différencie les personnes créatives et non créatives est cette distinction que relevait déjà Fichte entre activité et passivité : le créatif agit son monde ; le non-créatif est agi par le monde, le subit et en souffre, n'est pas maître de son existence. Cela ne signifie pas que le créatif soit tout puissant, mais au contraire qu'ayant pu dépasser le sentiment originaire d'omnipotence en transformant son aire d'illusion en un espace transitionnel opérant, il se rend capable de produire le sens de son existence et de vivre son désir en conciliant principe de plaisir et principe de réalité. Une telle capacité s'éprouve dans le sentiment que la vie vaut la peine d'être vécue, qui s'enracine dans le rapport de confiance que la mère a su élaborer avec son enfant, la nécessaire illusion primordiale, et dans le bon déroulement du processus de désillusion.

 

Il est en effet nécessaire que la mère établisse les conditions d'un tel sentiment de sécurité pour que l'enfant puisse maintenir l'illusion de sa capacité à produire le sein, illusion qui fournira au sujet qu'il deviendra la confiance en son désir et en son environnement, en sa capacité à composer de manière créative avec le monde.

La naissance de l'être-humain comme être-au-monde, être-là, c'est à dire présence au monde, naissance au monde du sujet comme être capable de donner un sens de manière auto-nome à son environnement et à sa vie, ne peut ainsi se penser indépendamment de son caractère d'être-avec, c'est à dire de son caractère d'être social, de son inscription dans le registre de la filiation, d'une appartenance à la communauté humaine : ce n'est qu'en tant qu'il est « soutenu » (holded) par l'humanité, à travers la fonction maternelle, que le sujet humain peut naître à l'humanité, comme être donateur de sens.

 

C'est parce que le nourrisson aura été originairement pris dans la totalité d'un être-monde dont il aura ensuite pu éprouver la déchirure d'une manière non-traumatisante, car opérée progressivement et avec le soutien du développement normal de l'espace transitionnel, d'abord à travers l'appropriation de l'objet transitionnel, le fameux « doudou » – cas général contre l'universalisation duquel nous met toutefois en garde Winnicott, rappelant que ce qui importe dans le transitionnel est le phénomène plutôt que l'objet ; certains enfants investissant cet espace sans passer par l'objet – qu'il sera capable de se constituer comme être-au-monde pleinement capable d'inventer son être dans une relation créatrice au monde. Si le phénomène transitionnel se développe correctement, à partir du moment où l'enfant pose la séparation, prend conscience d'une séparation entre lui et le monde, et son environnement, il devient capable de se lier à des objets de ce monde extérieur : il n'est pas de possibilité de se relier à un extérieur qui n'ait été préalablement posé comme tel, dont on ne soit d'abord séparé, vers lequel on puisse jeter un pont – ce que constitue précisément le phénomène transitionnel.

 

La séparation est ainsi seconde, et le sentiment fusionnel qui peut par la suite être éprouvé dans la vie, avec un partenaire amoureux, par exemple, ou dans le sentiment d'accomplissement que l'on ressent comme sensation de ne faire qu'un avec son activité, ne peut apparaître que dès-lors qu'elle est posée, dans la mesure où ce qui n'a fait son expérience ne peut faire celle d'une réunification, d'une abolition d'une distance qui n'aurait été préalablement posée.

 

La responsabilité de la mère est dès-lors immense : être « suffisamment bonne » pour permettre cette fusion ontologique première, et juste suffisamment bonne, pour permettre la distanciation qui autorisera le développement de l'altérité, et ainsi la possibilité de l'identification et de la constitution – tout aussi ontologique – d'une subjectivité propre.

 

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LHG 2013

 

 


 

 

1 La distinction qu'opère Winnicott entre « vrai Self » et « faux Self » n'entrera pas ici en ligne de compte.

 

2 Ce qui, au fond, apparaît comme un phénomène tout à fait ordinaire : pas la moindre molécule de notre corps ne peut en effet être considérée comme originairement nôtre : toutes proviennent de l'extérieur. A partir de quel moment peuvent-elles alors être considérées comme faisant partie de notre intégrité physique ? L'ingestion ? La digestion ? Leur incorporation à la structure de nos organes et tissus ? La même problématique s'applique aux éléments sociaux et familiaux intériorisés, qui deviennent des éléments psychiques constitutifs de notre identité subjective, de nos croyances, de notre éthique, de nos désirs...

 

3 « Personnellement, je considérerais que la Thérapie Comportementale est une insulte même pour les grands singes, et même pour les chats. » (D. W. Winnicott, extrait d'un courrier publié dans Psycho-Analytic Explorations, Londres. Kamac, 1989, p. 128, trad. Michel Gibrinski)

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